Wednesday, March 10, 2010

La réincarnation de notre Puntica

La réincarnation de notre Puntica


Rien ne vaut l’amour d’un bâtard.

Je soupçonne que toutes ces nobles créatures canines et félines de notre entourage devinent leur riche pédigrée et nous regardent avec un air détaché.
Comment nous, avec notre passé si obscur, pouvions nous nous mêler de leur vie de pur-sang?
Un bâtard ne se pose pas cette question, il nous aime tout simplement.
Tous les bâtards ont l’air d’être nés de la même mère. Du moins certainement les bâtards de la campagne. C’est ainsi qu’après quelques temps un petit chien qui ressemblait comme deux gouttes d’eau à Puntica apparut chez notre oncle. Il avait également quelque chose en commun avec elle. A chaque début d’été quand nous apparaissions dans notre maison de campagne, il arrivait à se dégager de ses chaînes mieux que Houdini et jusqu’à la fin des vacances nous offrait volontiers sa protection.
Ce qui offrait des avantages indiscutables, car lorsque ma femme Janina allait à la cueillette des champignons (en tant que passionnée de champignons, elle y allait chaque jour), Punto Junior l’accompagnait avec enthousiasme et lorsqu’il réapparaissait quelques temps après, nous savions que cinq minutes plus tard, apparaîtrait aussi notre ramasseuse familiale avec un panier rempli de champignons.

Et il y avait encore une chose exceptionnelle qui cette fois-ci le liait à moi... Je ne suis pas vraiment lève-tôt, et encore moins en Orava, où toute notre famille succombe à une trop forte dose d’oxygène de montagne. S’il on y ajoute les longues veillées près du feu, ceci exclut tout réveil avant dix heures du matin. Mais les rares fois où j’émergeais vraiment tôt le matin, Punto était déjà aux aguets devant la porte. Et encore dans l‘obscurité, bien en silence, nous partions tranquillement en promenade accueillir le soleil. Notre maison de campagne se trouve au niveau du seuil entre deux collines. Celle de l’ouest cache un vieux cimetière, et celle de l’est où arrive la remontée mécanique s’appelle Kohutik.

Nous avons emprunté cette direction avec Punto. Elle se situe justement à l’est. Après l’avoir franchie, une douce crête avec un autre sommet est apparue devant nous.
Là bas se situent une petite carrière et également un petit endroit d’où la vue porte loin vers l’est là où se rejoignent deux vallées formant cette crête.
C’est là que j’avais l’habitude de m’asseoir en attendant le lever du soleil.
C’est comme si Punto le sentait. Il s’asseyait bien sagement auprès de moi, haletait à mon oreille, s’ébrouait de temps en temps, se grattait le pelage avec la patte et attendait.
Le soleil ne nous a jamais fait faux bond. Il était toujours au rendez-vous.
Nous l’avons salué avec Punto et lentement, avec lui au-dessus de nous, nous prenions le chemin de retour réveiller tous ces dormeurs qui ne savaient pas que le miracle du jour qui se lève s’était une fois encore produit.
Punto était un bon compagnon mais il a mal fini.
Il aimait voyager en voiture, très souvent il courait derrière à perdre haleine lorsqu’à la fin de l’été nous plions bagages et nous apprêtions à rentrer.
J’ai même failli une fois avoir un accident alors que j’étais au volant. Je le voyais dans le rétroviseur avec, après chaque nouveau virage, certes un peu de retard, mais il persistait et réapparaissait toujours.
Et c’est bien son manque de respect des lois de l’automobilisme qui a très probablement mis fin à son existence.

Traduit par Antoine Ehret

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